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Faire une erreur est humain. Mais pour certaines personnes, ce simple constat ne suffit pas à apaiser l’angoisse. Car ce n’est pas tant l’erreur elle-même qui est redoutée, mais le regard que les autres poseront dessus. Comme si chaque faute, même minime, déclenchait une forme de condamnation silencieuse. Cette peur — souvent invisible, mais profondément envahissante — transforme chaque situation à enjeu en espace de menace sociale. On n’a plus seulement peur de rater… on a peur d’être vu en train de rater.


Quand le regard d’autrui devient un tribunal

Certaines erreurs sont objectives. Mais dans cette phobie, l’erreur devient un déclencheur de honte anticipée. L’idée même d’avoir pu se tromper déclenche des pensées comme :

  • “Ils vont penser que je suis bête.”
  • “Je vais perdre toute crédibilité.”
  • “Je ne serai plus jamais pris·e au sérieux.”

L’erreur est vécue comme un signal de disqualification sociale, un défaut impardonnable qui expose au rejet, à l’humiliation ou à l’exclusion.


Ce que cette peur produit au quotidien

  • Réticence à parler en public (de peur de dire une bêtise),
  • Auto-censure dans les conversations (éviter les sujets à risque),
  • Excès de contrôle dans les écrits ou présentations (relecture obsessionnelle),
  • Crise de panique en cas d’erreur détectée en public,
  • Rumination post-erreur (“Tout le monde l’a vu”, “Je suis ridicule”, “C’est fini”).

Cela peut concerner aussi bien la vie professionnelle que les relations amicales, les études ou même la vie quotidienne (mal orthographier un mot, oublier un prénom, confondre deux dates…).


Une peur enracinée dans l’histoire relationnelle

La phobie du jugement après l’erreur trouve souvent ses racines dans :

  • un vécu d’humiliation scolaire ou familiale,
  • une exposition excessive à la critique,
  • une absence de droit à l’erreur dans l’éducation (“Tu n’as pas le droit de te tromper !”),
  • une image de soi fragile, dépendante de la validation externe.

Dans certains cas, cette phobie prend racine dans des contextes sociaux ou professionnels très normatifs, où l’erreur est stigmatisée comme un manque de sérieux, d’intelligence ou de professionnalisme.


La mémoire de l’échec : un piège à répétition

Ce qui rend cette peur si persistante, c’est que l’erreur passée devient un traumatisme miniature. Le cerveau la rejoue encore et encore, en exagérant ses conséquences :

“Tu te souviens quand tu as bafouillé en réunion ?”
“Et ce jour où tu as donné la mauvaise info au client ?”
“Tu as vu comment ils t’ont regardée ?”

Le jugement est intériorisé, même quand personne ne critique réellement. C’est le regard fantasmé des autres qui devient source d’angoisse.


Ce que cette peur empêche

  • S’exprimer librement,
  • Prendre des risques créatifs,
  • Demander de l’aide ou poser des questions,
  • Partager ses idées ou ses ressentis,
  • Apprendre sereinement de ses erreurs.

En fuyant l’erreur pour éviter le jugement, la personne s’isole, se rétracte, cesse d’évoluer. L’environnement devient un espace d’évaluation permanente.


Comment sortir de ce piège invisible

1. Distinguer l’erreur de l’évaluation de soi → Une erreur n’est pas une condamnation. Elle ne dit rien de ma valeur personnelle.

2. Travailler la bienveillance envers soi → Accepter d’être imparfait·e, comme tout le monde. S’autoriser à être humain·e.

3. S’exposer progressivement → Prendre des petits risques assumés : oser se tromper, en parler, constater la réaction réelle des autres (souvent bienveillante… ou distraite !).

4. Revoir les croyances liées au jugement → Qui m’a appris que l’erreur rendait indigne ? Est-ce encore vrai aujourd’hui ?

5. Explorer ce que le regard de l’autre active → Est-ce de la peur ? De la honte ? Un souvenir d’enfance ? Une attente irréaliste ?


Témoignage fictif

“Quand je fais une erreur au boulot, je fais semblant de ne pas l’avoir vue. Pas parce que je m’en fiche, mais parce que j’ai peur qu’on me regarde comme si j’étais incompétente. Pourtant, personne ne me l’a jamais dit. C’est dans ma tête, mais c’est là, tout le temps.”
— Leïla, 32 ans


En conclusion

La phobie du jugement après l’erreur, c’est la peur d’être vu dans sa vulnérabilité. C’est confondre un acte imparfait avec une identité indigne. Pour s’en libérer, il ne suffit pas de “s’en foutre” du regard des autres — il faut apprendre à se regarder soi-même avec moins de sévérité, et à accepter que le droit à l’erreur est aussi le droit d’exister librement.

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