Elle est là, physiquement. Son corps bouge, respire, agit. Mais en elle, quelque chose flotte. Une distance, un malaise, une impression sourde de ne pas vraiment habiter ce corps. Elle se sent comme spectatrice d’elle-même. Ou prisonnière. Ou absente.
La peur d’habiter son corps ne relève pas d’un trouble passager. C’est une fracture intérieure, une séparation entre l’enveloppe et la conscience de soi.
Quand le corps devient un lieu étrange
Cette peur se manifeste dans :
- Une sensation d’être “hors de soi” ou d’habiter un corps “extérieur”
- Une gêne à ressentir physiquement : chaleur, douleur, plaisir, tension
- Des difficultés à se regarder, à se toucher ou à se montrer
- Un sentiment de déréalisation ou de flottement identitaire
Symptômes fréquents
- Dissociation : impression de flotter hors de son corps ou de n’être pas “pleinement là”
- Malaise corporel diffus, sans raison médicale
- Blocages dans le mouvement spontané ou la parole incarnée
- Tendance à s’exclure des moments de sensualité, de danse, de contact
- Sentiment de se “voir vivre” sans vraiment vivre
Ce que cette peur révèle
🧠 Une dissociation protectrice
Face à un traumatisme, un stress intense ou une dissonance identitaire, la conscience se coupe du corps pour survivre.
🫥 Une image de soi floue ou hostile
Le corps devient un lieu étranger, parfois menaçant, parfois muet.
💭 Une difficulté à relier sensations, émotions et pensées
On perçoit, on ressent… mais tout reste déconnecté.
🔄 Un rapport instrumentalisé au corps
On le gère, on le supporte, mais on ne l’habite pas.
Conséquences sur la vie psychique
- Difficulté à s’ancrer dans l’instant présent
- Sentiment d’irréalité, d’“exil intérieur”
- Blocages dans l’intimité, la créativité, la spontanéité
- Fatigue mentale liée à l’effort de “tenir” une posture de présence
- Risque de troubles dissociatifs ou d’alexithymie
Accompagnements thérapeutiques efficaces
💬 Thérapies psychocorporelles (somatic experiencing, IFS, pleine conscience)
Réapprendre à faire alliance avec son corps, sans forcer ni juger.
🧠 Travail symbolique et progressif de réintégration
Donner une place à ce qui a été exclu du champ de la conscience.
🧘 Pratiques douces de recentrage corporel
Respiration, étirements, mouvements conscients — pour réhabiter le corps par étapes.
🎨 Approches expressives non verbales
Danse libre, modelage, écriture sensorielle : exprimer ce qui n’a pas de mots.
Conseils pour réapprendre à habiter son corps
- Commencer par ressentir un point précis (le poids des pieds, la chaleur des mains…)
- Se parler avec douceur : “Tu es là. Je suis là.”
- Privilégier les vêtements, matières, gestes qui rassurent corporellement
- Explorer l’auto-contact (mains sur le cœur, sur le ventre) comme geste d’ancrage
- Éviter les injonctions à “se reconnecter vite” : aller lentement, avec respect
Conclusion
La peur d’habiter son corps n’est pas une bizarrerie. C’est souvent la trace d’un vécu trop intense, d’un lien à soi trop fragilisé.
Mais ce corps, aussi lointain soit-il, attend. Il n’accuse pas. Il ne réclame pas. Il est là. En attente d’être réhabité.
Et peut-être qu’un jour, à travers un souffle, un frisson ou un geste simple, on se sentira revenir chez soi.
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