Elle sent que ça monte. Une vague. Un frisson. Un trop-plein. Alors elle se redresse, elle respire fort, elle détourne la tête. Elle se dit : “Non, pas maintenant.”
Certaines personnes ne fuient pas les autres, ni les situations, mais leurs propres émotions. Ressentir devient un risque, une faille, une tempête intérieure qu’il vaut mieux éviter.
Quand ressentir devient une menace
La peur de ressentir se manifeste par :
- L’évitement de certaines situations ou personnes qui provoquent trop d’émotions
- Un contrôle permanent de son visage, de sa voix, de son corps
- Une difficulté à pleurer, à rire, à vibrer… même dans l’intimité
- Une réaction de fuite, de sidération ou de “froideur” dès qu’une émotion monte
Cette peur est rarement nommée, mais souvent vécue — avec solitude.
Symptômes fréquents
- Sensation d’être “déconnecté·e” ou “vide”
- Anxiété dès que l’émotion affleure
- Difficulté à verbaliser ce que l’on ressent réellement
- Saturation rapide dans les situations émotionnellement chargées
- Auto-jugement : “Je suis trop sensible”, “Je dramatise toujours”
Ce que cette peur révèle
🧠 Une hypersensibilité longtemps ignorée ou moquée
Petite, elle pleurait vite, elle vibrait fort. On lui a dit : “Sois forte”, “Tu es trop émotive.”
🫥 Une peur de perdre le contrôle
Les émotions sont vécues comme des vagues dangereuses, capables d’envahir tout le champ intérieur.
💭 Une confusion entre intensité émotionnelle… et instabilité
On associe ressentir fort à mal aller.
🔄 Un mécanisme de défense ancien
Moins on ressent, moins on souffre — mais aussi moins on vit.
Conséquences sur la vie psychique et relationnelle
- Difficulté à se connecter sincèrement à soi… et aux autres
- Tendance à intellectualiser ou à se couper de l’émotion dans le discours
- Blocages dans la créativité, l’intimité, l’expression personnelle
- Fatigue émotionnelle chronique : lutter contre ce qui monte épuise
- Risque d’anesthésie affective ou de somatisation
Accompagnements thérapeutiques efficaces
💬 Thérapies d’accueil émotionnel (humaniste, gestalt, ACT…)
Apprendre à ressentir sans juger, à traverser l’émotion au lieu de la fuir.
🧠 Déconstruire les croyances de “trop”
*“Je suis trop…” devient “Je ressens, c’est humain, c’est vivant.”
🧘 Travail corporel : réapprendre à habiter le corps
Ressentir dans le souffle, les gestes, les textures, en douceur.
🤝 Mise en confiance progressive dans la relation thérapeutique
Savoir que l’on peut être traversé·e sans être détruit·e.
Conseils pour apprivoiser ses émotions
- Créer un espace sécurisé pour ressentir (journal, voix, musique)
- S’autoriser à pleurer ou trembler, seul·e ou accompagné·e
- Répéter : “Ce que je ressens n’est pas dangereux”
- Distinguer émotion et action : ressentir n’implique pas d’agir
- Explorer les émotions agréables, pas seulement les douloureuses
Conclusion
La peur de ressentir n’est pas une faiblesse. C’est souvent la trace d’un vécu où l’émotion n’a pas été entendue, accueillie, contenue. Alors on apprend à la tenir loin.
Mais l’émotion ne cherche pas à submerger. Elle cherche à passer. À traverser. Et parfois, à nous dire simplement que nous sommes vivants, sensibles, humains.
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