Apprendre, c’est grandir, découvrir, s’ouvrir. Mais c’est aussi se tromper, essayer, recommencer. Et c’est précisément ce que certaines personnes redoutent. Pour elles, l’apprentissage n’est pas une aventure, mais un risque. Un terrain instable où chaque nouvelle notion est une occasion de montrer ses failles. Cette peur de l’erreur en contexte d’apprentissage peut devenir si forte qu’elle pousse à éviter d’apprendre, à refuser d’essayer, à choisir l’ignorance comme refuge. Un paradoxe douloureux, surtout dans des environnements valorisant la connaissance.
L’apprentissage perçu comme une menace
Pour beaucoup, apprendre est associé à :
- l’incertitude,
- la vulnérabilité,
- le risque de se tromper publiquement.
Quand ces éléments sont perçus comme dangereux, alors apprendre devient stressant, voire insupportable. Cela se manifeste par :
- une peur de poser des questions (“Et si on pensait que je suis bête ?”),
- un repli silencieux en cours ou en réunion,
- un évitement des formations, des lectures, des nouveautés,
- une résistance passive face à l’effort cognitif.
Cette peur pousse à stagner plutôt que d’échouer en apprenant.
Une honte souvent silencieuse
Ceux qui vivent cette phobie ne manquent pas d’intelligence ou de curiosité. Mais ils portent souvent une blessure scolaire ancienne, ou une image de soi fragile :
“Si j’ai besoin d’apprendre, c’est que je ne sais pas.”
“Si je me trompe, c’est que je ne vaux pas.”
“Je dois déjà tout comprendre pour mériter d’apprendre.”
L’apprentissage devient un lieu d’exposition, où l’erreur serait synonyme de faiblesse, incompétence, voire de ridicule.
Quand l’imposteur se cache dans le savoir
Chez les personnes souffrant du syndrome de l’imposteur, cette phobie est fréquente :
- elles refusent de se former (“Je devrais déjà savoir ça”),
- elles cachent leurs questions (“Si je demande, on va voir que je ne suis pas à la hauteur”),
- elles fuient les contextes d’apprentissage (“J’ai trop à faire pour me former maintenant…”).
Résultat : elles se privent des ressources qui pourraient justement les rassurer, les renforcer, les rendre plus légitimes.
L’ignorance choisie : un refuge temporaire
Ne pas apprendre peut devenir une stratégie de survie :
- on évite le risque d’erreur,
- on reste dans une zone connue,
- on se protège de la honte.
Mais ce refuge a un prix :
- isolement intellectuel,
- manque de développement professionnel,
- entretien du doute,
- renforcement de la peur initiale.
Plus on évite d’apprendre, plus on confirme l’idée qu’on est “incapable d’apprendre”.
Ce que cette peur empêche
- Évoluer professionnellement,
- Participer activement aux échanges,
- Exprimer sa curiosité sans peur,
- Accéder à des environnements d’apprentissage enrichissants,
- Se sentir en sécurité dans sa propre démarche cognitive.
L’apprentissage devient un terrain miné, alors qu’il devrait être un espace d’exploration.
Comment réapprivoiser l’apprentissage
✅ 1. Déconstruire la croyance “erreur = échec” → L’erreur est un signal, pas une faute.
✅ 2. S’autoriser à ne pas savoir → Tout savoir n’est pas une preuve de valeur. La curiosité est une preuve de vitalité.
✅ 3. Choisir des contextes sécurisants → Un·e mentor, un petit groupe, une formation bienveillante : on apprend mieux quand on se sent respecté·e.
✅ 4. Formuler ses peurs sans honte → “Je me sens nul·le quand je ne comprends pas tout de suite” = une phrase qui libère.
✅ 5. Apprendre à apprendre… avec douceur → Réintégrer le droit au brouillon, à la lenteur, à la redécouverte.
Témoignage fictif
“Quand on me propose une formation, je dis souvent non. Officiellement, c’est parce que je suis débordé. En réalité, j’ai peur qu’on me demande de participer, que je bloque, que les autres voient que je ne comprends pas. Alors je me dis que c’est mieux de ne pas y aller. Mais au fond, je me sens à la traîne.”
— Samir, 33 ans
En conclusion
La peur d’apprendre à cause de l’erreur est une blessure invisible mais fréquente. Elle ne dit pas : “je ne veux pas apprendre”, mais plutôt : “j’ai trop peur de ce que l’apprentissage pourrait révéler de mes limites.” Apprendre, pourtant, c’est aussi apprendre à être imparfait·e. Et dans cette imperfection, se rencontrer, se développer, se reconnaître. Lentement. Librement. Humainement.
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