On associe souvent l’agoraphobie à la peur de la foule. Mais ce trouble va bien au-delà. Il s’agit d’une peur intense des lieux dont il semble difficile de s’échapper ou de trouver de l’aide en cas de malaise. Paradoxalement, ces lieux sont souvent très ouverts, très publics — gares, centres commerciaux, places, rues piétonnes. Ce qui effraie ici, ce n’est pas tant la foule… que le vide de protection ressenti face à elle.
Quand l’espace devient piège
L’agoraphobie ne désigne pas une peur de l’agora au sens antique (la place du village), mais bien de tout environnement perçu comme non sécurisant. Cela inclut :
- Les grands espaces ouverts (places, parkings, avenues)
- Les lieux très fréquentés sans issue claire
- Les files d’attente ou lieux de transit (gares, aéroports)
- Les supermarchés, centres commerciaux, galeries
La personne agoraphobe ressent une angoisse intense liée à la perte de repères, au regard des autres, et à la crainte de ne pas pouvoir fuir.
Symptômes fréquents
- Accélération cardiaque, sueurs, vertiges en entrant dans un espace ouvert ou bondé
- Pensées catastrophistes : “Et si je faisais une crise ici ?”, “Et si je tombais ?”
- Besoin de localiser immédiatement une issue, une sortie, un banc, une pharmacie…
- Évitement de plus en plus large de certains lieux ou trajets
- Parfois, impossibilité de sortir seul·e sans accompagnement
- Dépendance croissante au domicile comme seul espace de “contrôle”
Ce que cette peur révèle
🧠 Une angoisse de la perte de maîtrise
L’espace ouvert représente l’imprévisibilité, le mouvement constant, le manque d’abri psychologique.
🫥 Une peur de la vulnérabilité exposée
La personne redoute de s’effondrer en public, d’être vue dans sa fragilité, sans pouvoir fuir ni se cacher.
🔄 Une boucle anticipation → évitement
La peur de faire une crise crée de l’angoisse… qui renforce la probabilité d’une crise. D’où l’installation d’un cercle vicieux.
🧬 Un choc ou une crise fondatrice
Souvent, l’agoraphobie débute après une première crise de panique dans un lieu ouvert. L’espace devient associé au trauma.
Conséquences dans le quotidien
- Difficulté à travailler, se déplacer, faire ses courses
- Isolement progressif, repli social
- Perte de spontanéité dans les sorties, les voyages, les projets
- Dévalorisation, honte de “ne pas être capable”
- Stratégies d’évitement de plus en plus rigides
Approches thérapeutiques efficaces
🧠 Thérapies cognitivo-comportementales (TCC)
Travail sur les pensées anticipatoires, les croyances sur la dangerosité du lieu, et les stratégies d’exposition progressive.
💬 Thérapies d’acceptation et d’engagement (ACT)
Apprendre à vivre avec l’angoisse sans se laisser diriger par elle, retrouver une flexibilité mentale.
🧘 Ancrage corporel et régulation du système nerveux
Exercices de respiration, points d’appui, présence au corps pour retrouver une stabilité intérieure dans l’espace extérieur.
🗺️ Planification douce d’expositions
Créer des “itinéraires sécurisés”, avec lieux-refuges repérés, horaires calmes, accompagnement bienveillant.
Conseils concrets pour apaiser l’agoraphobie
- Commencer par revenir dans un lieu évité pendant quelques minutes, avec une sortie claire et un objectif simple
- Se munir d’un “kit rassurant” : écouteurs, bouteille d’eau, objet apaisant
- Se répéter des phrases ressources : “Je ne suis pas en danger. Ce lieu est neutre. Je peux sortir si besoin.”
- Célébrer chaque petit pas, sans viser la perfection
- Ne pas hésiter à demander un accompagnement professionnel, même si “on tient encore”
Conclusion
L’agoraphobie est bien plus qu’une gêne dans les lieux publics : c’est une lutte intérieure pour se sentir en sécurité dans un monde mouvant. C’est une peur de s’effondrer sans abri, d’exister sans cadre, de perdre le fil dans un espace trop vaste.
Mais avec des outils adaptés, une approche bienveillante et progressive, il est possible de reprendre possession de ces lieux, et par là même, de son autonomie et de son espace de vie.
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