On croit souvent que la liberté est un idéal universel, un objectif à atteindre, une condition de bonheur. Pourtant, pour certaines personnes, cette liberté n’est pas un soulagement — c’est une source d’angoisse profonde. La liberté confronte au choix, au doute, à la responsabilité. Et parfois, elle devient si lourde qu’on en vient à la redouter. C’est la peur existentielle de la liberté, un paradoxe psychique peu connu mais très réel.
Quand la possibilité devient vertige
La phobie de la liberté ne signifie pas vouloir être enfermé·e, mais avoir peur de ce que la liberté implique :
- Faire des choix
- Renoncer à d’autres possibles
- Être responsable des conséquences
- Se retrouver face à soi-même, sans excuses extérieures
Ce n’est pas la liberté comme concept qui angoisse, mais le fait de devoir l’assumer dans sa vie concrète.
Symptômes caractéristiques
- Blocage devant toute décision importante (orientation, changement, rupture…)
- Stress intense face à un choix même mineur (menu, activité…)
- Besoin de validation ou d’autorisation extérieure
- Sentiment de vide ou de désorientation une fois “libéré·e”
- Recherches répétées de cadres stricts, routines, règles imposées
- Culpabilité d’avoir choisi, même librement
Ce que cette peur révèle
🧭 La liberté suppose le risque
Choisir, c’est potentiellement se tromper. Pour certaines personnes, cela réveille une peur massive de l’erreur ou de l’échec.
🧠 Le choix révèle l’identité
Quand on choisit, on révèle quelque chose de soi. Cela peut être vécu comme un danger d’exposition, un dévoilement intérieur non assumé.
🪞 L’absence de contraintes révèle le vide
La liberté, sans projet, sans appui, peut devenir un miroir du non-sens ou de la perte de repères.
👣 Le choix oblige à agir
Certaines personnes préfèrent rester dans l’attente perpétuelle plutôt que d’assumer un mouvement.
Origines possibles
- Éducation rigide ou autoritaire ayant écrasé l’autonomie personnelle
- Expériences passées de choix mal vécus ou regrettés
- Personnalités perfectionnistes ou anxieuses
- Contexte culturel où la liberté est synonyme de culpabilité ou d’égoïsme
- Sentiment de manque d’estime de soi : « Je ne suis pas capable de choisir pour moi-même »
Conséquences sur le quotidien
- Indécision chronique ou inertie existentielle
- Dépendance affective ou sociale (besoin d’être guidé·e)
- Sabotage des opportunités de liberté (refus de promotion, de séparation, d’évolution…)
- Dépression masquée liée au non-choix répété
- Impression de subir sa vie malgré des espaces de liberté disponibles
Accompagnements thérapeutiques possibles
💬 Thérapie existentielle
Explorer ce que représente la liberté : espoir, peur, héritage culturel, image de soi… Remettre du sens dans le choix.
🧠 Travail sur la tolérance à l’imperfection
Apprendre à choisir sans garantie, à se tromper sans se détruire, à avancer malgré l’incertitude.
🧘 Travail sur l’ancrage
Ramener les choix au présent concret : que ressens-tu maintenant ? Qu’est-ce que ton corps te dit ? Où est l’élan ?
🖋 Écriture ou art de décision
Mettre en scène ses alternatives, écrire les scénarios possibles, dessiner ses peurs pour les rendre visibles, donc modulables.
Conseils pour apprivoiser la liberté
- Commencer par des petits choix quotidiens non risqués, pour s’entraîner à se faire confiance
- Remplacer “bon ou mauvais choix” par “choix qui me ressemble aujourd’hui”
- S’autoriser à choisir temporairement, sans se figer
- Accepter que toute liberté suppose une forme de solitude, mais aussi une puissance unique
- Créer des rituels de décision : lieu, temps, ancrage corporel, visualisation
Conclusion
La peur de la liberté est une peur du possible, de l’infini, mais aussi du soi en devenir. Elle touche à la responsabilité, à l’identité, à l’engagement. Et elle nous dit, en creux, combien nous craignons notre propre puissance.
Apprendre à choisir, à dire “oui” ou “non”, à orienter sa vie, c’est se redonner la capacité d’exister par soi-même. Non pas contre les autres, mais en lien plus libre avec eux. La liberté n’est pas un poids à porter, mais un espace à habiter.
Laisser un commentaire
Vous devez vous connecter pour publier un commentaire.